Pour sa première visite officielle au Kazakhstan, le Président Emmanuel Macron s’est inscrit dans la continuité de ses prédécesseurs, qui n’ont cessé d’œuvrer pour renforcer le partenariat avec ce grand État d’Asie centrale.
Par Clément Airault
Emmanuel Macron était au Kazakhstan le 1er novembre 2023. Cette première visite officielle du Chef de l’État français à Astana, « à laquelle le Président accorde beaucoup d’importance », selon l’Élysée, était attendue de longue date. Prévue depuis fin 2018, elle n’avait pu avoir lieu jusqu’à présent. C’est désormais chose faite.
Une longue tradition diplomatique
La visite du Président Emmanuel Macron s’inscrit dans une longue tradition diplomatique entre la France et le Kazakhstan, devenu indépendant le 16 décembre 1991. La première pierre des relations diplomatiques entre les deux États est posée le 25 janvier 1992. La France est alors la première nation européenne à reconnaître l’indépendance de l’ancienne république soviétique. Le Président François Mitterrand se rend au Kazakhstan en septembre 1993, en compagnie d’une délégation de chefs d’entreprise français, amorçant par là même une ère de collaboration économique fructueuse, et le début d’un partenariat qui n’a cessé de se renforcer au cours de ces 30 dernières années.
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Dans le sillage du Président Mitterrand, presque tous les locataires de l’Élysée, à l’exception de Jacques Chirac, ont visité les steppes kazakhstanaises. Nicolas Sarkozy, qui entretenait de bonnes relations avec l’ancien Président Nazarbayev, fut invité en 2009 à Astana. À l’occasion de sa venue, plusieurs contrats majeurs furent signés. Sous sa présidence, les investissements français se sont fortement renforcés, et un an après sa visite une Commission présidentielle franco-kazakhstanaise vit le jour, symbolisant ce dialogue au plus haut sommet des États.
Son successeur, François Hollande, a effectué une visite au Kazakhstan en 2014. Tout en n’éludant pas les questions économiques et commerciales, il a souhaité se démarquer de son prédécesseur en mettant l’accent sur un point fort de la relation bilatérale, celui du savoir. Vingt présidents d’université l’accompagnaient dans sa visite. La coopération universitaire et scientifique entre Paris et Astana s’est ainsi affermie, avec l’inauguration par le Président français de l’Institut Sorbonne-Kazakhstan à Almaty, né « de la volonté de l’Université nationale pédagogique Abaï (KazNPU) et de l’Université Sorbonne Paris Cité (USPC) d’offrir un haut niveau de formation aux étudiants du Kazakhstan et d’Asie centrale ». En 2010, avait déjà été créé le Centre géo-énergies. Ce projet conjoint entre l’Université de Lorraine et l’université nationale Al-Farabi a, depuis son lancement, formé près d’une centaine de diplômés en master « Énergies », et permis la délivrance d’une dizaine de thèses de doctorat. La coopération culturelle, scientifique et technique reste primordiale pour les deux pays.
Du point de vue diplomatique, les relations bilatérales se fondent sur un soutien mutuel. Ainsi, la France a soutenu les candidatures du Kazakhstan à la présidence de l’OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe) et à la convocation du Sommet de cette organisation à Astana en 2010, ainsi que son adhésion non permanente au Conseil de sécurité des Nations unies en 2017-2018. De son côté, le Kazakhstan affirme soutenir « systématiquement les initiatives françaises dans le domaine du développement durable, de la lutte contre le réchauffement climatique et de la lutte contre le terrorisme international ».
Un partenariat stratégique qui change tout
Afin de dynamiser « les échanges commerciaux entre les deux pays », un Traité de partenariat stratégique a été signé en 2008. « C’est la France, parmi tous les pays de l’Union européenne, qui a été la première à signer le Traité de partenariat stratégique avec nous », rappelait le Président Kassym-Jomart Tokayev dans un entretien accordé à L’Essentiel des relations internationales en mars 2021. C’est d’ailleurs à Paris qu’il a choisi de se rendre pour son premier déplacement européen après sa réélection, en novembre 2022. La signature du partenariat stratégique s’est accompagnée de la création du Conseil des affaires franco-kazakhstanais (CAFK). Cet organe consultatif, « visant à accroître l’efficacité des relations économiques entre la République française et la République du Kazakhstan », est composé de représentants des cercles d’affaires des deux pays et se réunit au moins deux fois par an.
Quinze ans après la signature de ce Traité de partenariat stratégique, l’Hexagone fait partie des cinq principaux partenaires commerciaux et d’investissement du géant de l’Asie centrale. En 2020, le Kazakhstan était le 2e fournisseur de pétrole brut de la France, derrière les États-Unis. En 2021, Paris est devenu le 7e client d’Astana, absorbant 4 % de ses exportations. Environ 170 entreprises françaises travaillent aujourd’hui au Kazakhstan, parmi lesquelles Total, Orano, Air Liquide, Alstom, Danone ou Vicat. Les avions Airbus « sont construits avec du titane kazakhstanais, tandis que les raffineries et les centrales nucléaires françaises utilisent du pétrole et de l’uranium produits dans notre pays », rappelait en 2021 le Président Tokayev. Par ailleurs, depuis le 1er janvier 2017, les Français et autres citoyens de l’Union européenne sont exemptés de visa pour un séjour n’excédant pas 30 jours.
Sous l’ère Macron, les échanges entre les Gouvernements kazakhstanais et français n’ont cessé de se renforcer ces cinq dernières années, notamment sur les questions commerciales. Un Forum des investissements France-Kazakhstan s’est tenu à Paris en 2018, en présence de Jean-Baptiste Lemoyne, Secrétaire d’État auprès du Ministre des Affaires étrangères français, et de Yerlan Khairov, Président du Comité d’État aux investissements de la République du Kazakhstan. Jean-Baptiste Lemoyne fut le premier membre du Gouvernement d’Emmanuel Macron à se rendre à Astana à l’occasion de l’Exposition universelle 2017, consacrée aux énergies du futur.
Les gouvernements respectifs ne rompent pas le contact. Bruno Le Maire, Ministre de l’Économie et des Finances, a effectué une visite dans la capitale kazakhstanaise en juillet 2019. Il s’agissait du premier déplacement du Ministre en Asie centrale depuis sa prise de fonction. C’était aussi la première visite au Kazakhstan d’un ministre de l’Économie et des Finances français depuis l’indépendance du pays. Le Ministre délégué chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger, Franck Riester, s’est quant à lui rendu au Kazakhstan en mai 2021. Son successeur, Olivier Becht, est allé à Astana en mai 2023 en compagnie d’Isabelle Dumont, conseillère diplomatique du Président français. Tous deux ont été reçus par le Président Tokayev afin de discuter des perspectives de renforcement des relations bilatérales entre Astana et Paris, et de mieux définir les domaines de coopération amenés à se développer dans l’avenir, dans le cadre de l’approfondissement du partenariat stratégique. La transition énergétique, la gestion des ressources en eau, l’agriculture, la santé ainsi que les matières premières critiques sont autant de sujets qui ont été évoqués.
Paris reste l’un de principaux « partenaires politiques et économiques » d’Astana, comme l’a déclaré Kassym-Jomart Tokayev en mai dernier, en invitant son homologue français à visiter le pays. Cette rencontre va donner une nouvelle impulsion aux relations franco-kazakhstanaises, selon la feuille de route établie jusqu’en 2030. « La crise actuelle doit être considérée comme une fenêtre de nouvelles opportunités, ouvrant la voie à un monde plus ouvert, inclusif et prévisible », estime le Président kazakhstanais.
Le saviez-vous ?
Le général de Gaulle s’est rendu sur le territoire kazakhstanais, dans le cadre d’une visite historique en URSS, du 20 juin au 1er juillet 1966. Il avait alors visité le cosmodrome de Baïkonour et assisté au lancement d’un satellite, ce qui constituait une première pour un chef d’État occidental.