Le Kazakhstan sait innover, pour être un pays à la pointe de la technologie, tant dans le numérique que l’aérospatiale. Bagdat Moussine nous détaille quelques avancées significatives sur ces questions.
Propos recueillis par Clément Airault
Quelles avancées spécifiques ont été réalisées dans la transformation des services publics en formats numériques au Kazakhstan, et comment ont-elles simplifié l’accès à ces services pour la population ?
Le Kazakhstan se classe au 28e rang dans l’indice de développement de l’administration en ligne des Nations unies, avec une remarquable 8e position pour les services en ligne. Cela reflète les progrès réalisés par le pays en matière de numérisation des services publics. Depuis juillet 2017, un système de « login – mot de passe » à usage unique a remplacé les signatures numériques électroniques. Depuis le 29 décembre 2017, les citoyens peuvent s’inscrire pour obtenir un certificat de naissance par SMS plutôt qu’en présentiel. En 2018, le portail de l’administration en ligne est devenu la principale plateforme d’accès aux services.
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En 2022, 94,1 % des 282,7 millions de services ont été fournis par voie électronique. Sur 1 300 services évalués, 92,3 % sont sur le portail web de l’administration en ligne, et 80 % sont accessibles via eGov mobile. Actuellement, des services notariaux numériques sont disponibles. Le Registre des services publics a été mis à jour, assurant la reconnaissance juridique des documents numériques.
Le Kazakhstan est en train de passer à un modèle de numérisation basé sur une plateforme, visant à mettre en place un appareil gouvernemental efficace et centré sur le citoyen. Ce modèle favorise la gestion des données en temps réel et permet l’application d’outils d’intelligence artificielle. L’architecture de la plateforme Kaztech (GovTech) a été approuvée le 18 octobre 2022.
Comment votre ministère a-t-il réussi à créer un écosystème de haute qualité pour l’industrie des technologies de l’information au Kazakhstan ?
À ce jour, le Kazakhstan compte plus de 16 000 entreprises informatiques, qui emploient plus de 182 000 professionnels des technologies de l’information. Parallèlement, le ministère participe activement à des initiatives visant à former des spécialistes en informatique. Selon les statistiques, les étudiants en informatique sont de plus en plus nombreux. Le pays compte actuellement 83 écoles d’informatique, contre seulement 51 l’année précédente (2022). Le ministère a également lancé en 2021 le programme Tech Orda, destiné à préparer des professionnels de l’informatique talentueux. En outre, une collaboration est en cours avec de grandes entreprises telles que EPAM, Binance, Google, Huawei, pour la distribution de cours éducatifs. Un mécanisme similaire sera mis en place en décembre de cette année, pour les enseignants en informatique.
Le Chef de l’État s’est fixé pour objectif de porter les exportations de technologies de l’information à 1 milliard de dollars américains d’ici 2026. L’année dernière, elles ont été multipliées par cinq, atteignant 334 millions de dollars, et au premier semestre de cette année, elles se sont élevées à 247 millions de dollars. Le fonds d’entreprise « International Technopark of IT Startups » — Astana Hub — propose des programmes d’accélération et d’incubation visant à renforcer les compétences pour l’exportation de services informatiques. Il fournit également des infrastructures, une aide à l’obtention de visas et des incitations fiscales aux participants. À l’heure actuelle, le technoparc compte 1 311 participants, dont les exportations s’élèvent à environ 230 milliards de tenges (plus de 460 millions d’euros).
Grâce au programme d’accélération Silkway, Astana Hub est le partenaire exclusif de Google for Startups dans la région d’Asie centrale, ce qui fait du Kazakhstan le plus grand acteur régional dans le domaine des technologies de l’information.
En 2022-2023, trois programmes d’accélération ont été menés, avec un total de 37 projets de premier plan en cours d’accélération. En outre, Astana Hub a annoncé le lancement du programme d’accélération Hero Training dans la Silicon Valley, mis en œuvre en collaboration avec l’Université Draper. Ce programme est conçu pour les startups et les entreprises informatiques des États turciques. Le lancement officiel du « Silkroad Innovation Hub », un centre d’innovation, a eu lieu le 15 septembre dernier en Californie, aux États-Unis.
Quelle place occupe le Kazakhstan en matière de cybersécurité dans la région et comment s’articule la collaboration avec les États européens sur ces questions ?
Le Kazakhstan a adopté un nouveau concept de cybersécurité pour la période allant de 2023 à 2029. À la lumière de l’expérience internationale, l’attention est portée sur la nouvelle stratégie de cybersécurité de l’Union européenne et sur son importance pour le renforcement de la résilience collective face aux cybermenaces en Europe. Le Kazakhstan soutient activement les autres pays et collabore avec eux dans ce domaine, en soulignant son adhésion aux normes internationales en matière de cybersécurité. Il convient également de noter que le Kazakhstan participe activement aux sessions du groupe de travail informel sur la sécurité des technologies de l’information et de la communication de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).
Il convient de noter que le Kazakhstan est le seul pays d’Asie centrale qui gère les mesures de confiance au sein du groupe de travail informel de l’OSCE. En mai 2023, en collaboration avec le Secrétariat de l’OSCE et avec le soutien du Royaume-Uni, le Kazakhstan a organisé avec succès une formation sous-régionale sur la sécurité des technologies de l’information et de la communication à Astana, réunissant des pays d’Asie centrale et la Mongolie. Cet évènement a illustré le travail pratique du Kazakhstan dans le domaine de la cybersécurité et a confirmé son engagement à renforcer la sécurité. Par ailleurs, dans le cadre de son concept national de cybersécurité, le Kazakhstan met l’accent sur la coopération avec les Nations unies.
Quelle est la place de l’industrie aérospatiale dans le paysage économique kazakhstanais et quels sont les échanges avec la France dans ce secteur ?
Le Kazakhstan coopère avec ses voisins les plus proches, fournit des services spatiaux au Tadjikistan, mène conjointement avec la Russie des activités au cosmodrome de Baïkonour et développe une coopération dans le domaine de la recherche scientifique et technique avec les pays d’Asie centrale. L’un des projets importants concerne la constellation de satellites de télédétection (observation) de la Terre.
Le système spatial kazakhstanais de télédétection de la Terre a été créé conjointement avec la France, et des satellites d’observation de la Terre ont été lancés en 2014. Aujourd’hui, le Kazakhstan exploite avec succès un système spatial d’observation de la Terre composé de deux engins spatiaux optiques — KazEOSat-1 et KazEOSat-2 — et d’un complexe terrestre de contrôle, de réception et de traitement des données spatiales.
Il ne fait aucun doute qu’avec le soutien de nos partenaires français, l’industrie aérospatiale du Kazakhstan a fait des progrès remarquables. En 2009, les gouvernements de nos deux pays ont signé un accord de coopération dans le domaine de la recherche et de l’utilisation pacifique de l’espace extra-atmosphérique. Nous avons créé une entité unique, Ghalam (« univers », en kazakh), qui se présente comme un phare de l’innovation en Asie centrale. Ghalam a déjà démontré ses prouesses en créant le système spatial technologiquement avancé KazSTSat, en établissant une installation de production dédiée à la fabrication de composants spatiaux, et en érigeant un centre d’assemblage, d’intégration et de test adapté aux besoins des engins spatiaux.