Par Clément Airault
La nomination par Emmanuel Macron de Michel Barnier au poste de Premier ministre, le 5 septembre, a provoqué une bronca dans le monde politique français. Durant sept semaines — depuis le deuxième tour des élections législatives anticipées ayant abouti à une Assemblée nationale fracturée en trois blocs politiques —, le Chef de l’État a cherché à trouver un Premier ministre qui éviterait la censure et qui serait capable de former une coalition à l’Assemblée nationale. Avec Michel Barnier, il n’est pas sûr que cela fonctionne. Pour la gauche, et en particulier les membres du Nouveau Front populaire (NFP), qui espéraient voir leur candidate Lucie Castets nommée à Matignon, cette décision présidentielle apparaît comme un « coup de force ».
Car si Michel Barnier est perçu comme un homme de consensus, il n’en reste pas moins de droite, et sa nomination semble soutenue par l’extrême droite. Âgé de 73 ans, le plus vieux Premier ministre de la Ve République a milité dès ses 14 ans au mouvement gaulliste, en Savoie. Droit dans ses bottes, il est toujours resté fidèle à ses valeurs, depuis qu’il a été élu en tant que conseiller général du canton de Bourg-Saint-Maurice en 1973. Il a été candidat au congrès des Républicains pour l’élection présidentielle de 2022. Élu député pour la première fois en 1978, à l’âge de 27 ans, il a par la suite dirigé plusieurs ministères : l’Environnement, les Affaires européennes, les Affaires étrangères, l’Agriculture et la Pêche.
Lui qui avait participé à l’élaboration du projet de Constitution européenne sous Valéry Giscard d’Estaing, il fut deux fois commissaire européen (à la Politique régionale, puis au Marché intérieur et aux Services financiers), et vice-président de la Commission européenne. À partir de 2019, il devient négociateur en chef pour l’Union européenne, chargé de mener les négociations liées au Brexit.
Aujourd’hui, ce sont d’autres négociations qui s’ouvrent à lui, face à une France fracturée politiquement. Michel Barnier va devoir faire œuvre de consensus. Il semble d’ores et déjà impossible de satisfaire l’extrême droite et l’extrême gauche. Après la trêve estivale des Jeux olympiques, la tension sociale et le combat politique ne peuvent que se renforcer dans les prochains mois.