L’organisation des 26es Jeux olympiques et paralympiques d’hiver est pratiquement acquise pour la France. Après Chamonix-Mont-Blanc (1924), Grenoble (1968) et Albertville (1992), l’Hexagone devrait accueillir pour la quatrième fois les JO d’hiver en 2030. Malgré l’opposition des écologistes, l’enthousiasme du plus grand nombre a pris le dessus. Quelles sont les réticences exprimées, et quels bénéfices sont attendus ?
Par Marie Forest
Quatre sites avaient exprimé leur intérêt pour organiser les Jeux d’hiver 2030, et mené des études de faisabilité : Salt Lake City, aux États-Unis, qui a finalement repoussé sa candidature à 2034 ; Stockholm-Åre, en Suède ; la Suisse ; et les Alpes, en France. C’est finalement cette dernière qui a été retenue par le Comité international olympique (CIO). Pour Karl Stoss, son président, « les points forts de la France [étaient] clairs : une longue tradition de sports d’hiver, une longue tradition d’organisation de compétitions de sports d’hiver, un très fort patrimoine… [et] l’expérience recueillie avec Paris 2024 ». Si cette candidature doit encore obtenir une garantie financière de l’État d’ici le 1er mars 2025, cette dernière est pratiquement acquise.
Ce contenu est réservé aux abonnés
Avantages et inconvénients d’accueillir les jeux
Les retombées positives de la tenue des JO sur un territoire se déclinent en termes sociétaux, économiques et écologiques, en un cercle vertueux. Côté infrastructures, la modernisation, voire la création d’installations sportives, le développement des moyens de transport public, la construction de logements pour les athlètes permettent non seulement de rénover le paysage urbain des villes hôtes, notamment dans les zones défavorisées, mais aussi de dynamiser la région en créant des emplois. À l’issue des Jeux, les clubs et associations sportives constatent une hausse du nombre de leurs adhérents, les habitations des villages olympiques sont utilisées comme logements sociaux ou privés, toutes choses qui stimulent l’économie locale. La qualité de vie des habitants s’en trouve durablement améliorée, car ils bénéficient de tous les aménagements conçus à cette occasion.
De plus, les villes olympiques s’attachent de plus en plus à être dans une démarche de développement durable, en investissant dans les énergies renouvelables pour une réduction de la pollution et en gérant les déchets de façon responsable. Cette conscience écologique profite à tous. Par ailleurs, la visibilité extraordinaire acquise participe à la valorisation des traditions et des patrimoines culturel et naturel. Cette vitrine internationale renforce l’attractivité de la destination, et l’on constate régulièrement après les JO une hausse de la fréquentation touristique. Ce qui a des répercussions positives sur l’économie, sur le long terme.
Cependant, pour les détracteurs des Jeux, les coûts financier et environnemental sont globalement négatifs. Les opposants pointent les montants investis dans les équipements sportifs et ceux qui seront nécessaires à leur maintenance, tout en s’inquiétant du risque d’augmentation du prix de l’immobilier dans des zones qui auront connu une gentrification du fait de l’amélioration des infrastructures locales.
Mais c’est du côté de l’environnement que la pression est la plus forte. Les nouvelles constructions ont une empreinte carbone certaine, ainsi que les déplacements des sportifs et spectateurs venus du monde entier. Fiona Mille, présidente de l’ONG Mountain Wilderness, dénonce sur France Bleu « un contre-sens » : « On vend du rêve en faisant du ski dans un monde qui fond et alors que des stations ferment. » Même son de cloche chez le collectif No JO : « En 2050, la totalité des glaciers alpins situés en dessous de 3 400 m d’altitude aura disparu. Les glaciers s’écroulent, les éboulements rocheux se multiplient, les refuges de haute montagne ferment les uns après les autres, mais on nous affirme qu’on pourra toujours faire du ski et qu’on doit continuer à faire du ski. » La surfréquentation touristique en montagne, délétère pour les écosystèmes, est aussi décriée.
Retombées et enjeux des JO 2030
« S’inspirer de Paris 2024 », telle est la volonté des organisateurs des JO d’hiver des Alpes françaises 2030. La France a la volonté de proposer une édition « sobre » et « responsable », au cadre budgétaire maîtrisé. Ainsi, quatre sites ont été choisis, pour capitaliser sur les infrastructures existantes et limiter les coûts ; certaines épreuves se tiendront même en dehors des frontières pour éviter d’investir dans un anneau de vitesse pour le patinage. Le cabinet Asterès a réalisé une étude sur le prix des futurs Jeux d’hiver : 3 milliards, dont 2 milliards pour l’organisation (principalement sur fonds privés) et 1 milliard pour les infrastructures (sur fonds publics). Les secteurs hôtellerie-restauration, audiovisuel et construction seraient équitablement pourvus. Si ce budget est respecté, « il s’agirait des Jeux les moins chers depuis Calgary en 1988 », selon un communiqué du conseil régional d’Auvergne-Rhône-Alpes.
Au niveau de l’impact économique, Asterès estime que 48 000 emplois seraient créés, et ses modélisations affichent 3,6 milliards d’euros de valeur ajoutée (0,15 % du PIB sur six ans) et 1,6 milliard d’euros de recettes fiscales et sociales. Les retombées profiteraient pour moitié aux départements hôtes, qui tablent de plus sur une mise en lumière de leur patrimoine pour attirer des touristes.
Sur le plan sociétal, les villes organisatrices comptent imiter l’exemple parisien en axant leur politique d’emploi sur l’inclusion sociale et la diversité, avec des initiatives en direction des quartiers prioritaires et des populations en difficulté. La promotion des bienfaits de la pratique sportive participe également de cette volonté d’inclusion.
Enfin, le volet environnemental n’est pas des moindres. Le cahier des charges de ces Jeux inclut pour la première fois des exigences en matière de développement durable. « Minimiser les émissions de carbone », « chercher à éliminer de l’atmosphère plus de carbone que n’en émet le projet », « encourager les parties prenantes à adopter des mesures en faveur du climat », « promouvoir des formes de tourisme plus durables » sont des exemples des critères mis en avant. Pour les infrastructures, nouvelles et restaurées, il sera fait appel à des technologies innovantes afin de les rendre écologiques et résilientes aux aléas climatiques.
Organiser des Jeux olympiques est un pari. C’est un projet global, qui doit servir une région et, au-delà, une nation. Il faut que les investissements économiques déployés soient couverts par les bénéfices, que les retombées en termes de visibilité bénéficient à l’hôte, que les avancées technologiques utilisées assurent la durabilité des infrastructures. Il s’agit aussi de briller à l’international. La cérémonie d’ouverture des JO 2024 a été organisée hors d’un stade ; en miroir, celle de clôture des JO 2030 se tiendra également en un lieu ouvert, sur l’emblématique Promenade des Anglais à Nice.
Les Jeux 2024 en chiffres
Durant les Jeux 2024, le taux d’occupation des hôtels parisiens a atteint 80 % début août, soit 15 % de plus qu’en 2023 à la même époque. Les achats par carte de crédit ont augmenté de 159 % pour les musées et théâtres, 42 % pour les supermarchés et épiceries, 36 % pour les restaurants. La croissance du secteur de la construction a connu une embellie de plus de 3 %. Les paris sportifs ont atteint 360 millions d’euros, soit 6 fois plus que durant les Jeux de Tokyo 2021.
Globalement, la Banque de France estime que l’impact sur l’économie française a été de 0,25 %, et le ministère de l’Économie évalue à 9 milliards d’euros les retombées sur le pays d’ici 15 an, contre 6,7 milliards prévus.
Déroulement prévu des Jeux 2030
Dates :
– Jeux olympiques : du 1er au 17 février
– Jeux paralympiques : du 1er au 10 mars
Lieux :
– 2 régions (Auvergne-Rhône-Alpes, Provence-Alpes-Côte d’Azur)
– 4 départements (Haute-Savoie [lac Léman], Savoie, Hautes-Alpes [Briançon], Alpes-Maritimes [Nice])
– 1 ville hors de France (sans doute Turin, en Italie)
Sites :
– 93 % de sites déjà existants ou temporaires
– 5 villages olympique
Budget :
– 1,5 milliard d’euros
Source : https://olympics.com/fr/infos/jeux-olympiques-d-hiver-alpes-francaises-2030-ce-qu-il-faut-savoir-sur-le-pays-hote