C’est l’un des ministères clés du Gouvernement. À la tête de ce département aux portefeuilles multiples, Marie Chantal Nijimbere agit pour accentuer l’essor de l’économie et l’attraction du pays à l’international.
Propos recueillis par Clément Airault
Quelles sont les priorités définies pour faciliter le commerce ? Qu’est-ce qui entrave encore son essor ?
Le commerce reste l’un des piliers du développement du Burundi. C’est la plus importante composante du secteur des services et il participe à la création de richesses, avec une contribution de plus de 20 % à la formation du PIB. La base d’exportation du Burundi reste particulièrement étroite et fortement concentrée autour de quelques produits primaires et d’autres produits d’industries extractives. Les importations comprennent principalement les produits alimentaires, les combustibles, le matériel de transport, les textiles, le ciment, les médicaments et les intrants agricoles.
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Certains documents de stratégie ont été élaborés et d’autres sont en cours pour promouvoir le secteur du commerce, à l’image, en 2021, de la Stratégie nationale de mise en œuvre de la politique commerciale du Burundi, de la Stratégie nationale de mise en œuvre de l’accord de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), de la Stratégie nationale pour la promotion du commerce transfrontalier, etc.
Bien que des réformes ont été engagées en vue de l’amélioration du climat des affaires, il reste encore des défis à relever. Pour y faire face, des actions ont été menées afin de diagnostiquer l’environnement des exportations pour contribuer à la levée des barrières non tarifaires limitant les exportations, d’introduire un régime commercial simplifié en faveur des petits commerçants, de mettre en place une plateforme pour les producteurs de services en vue de promouvoir les exportations, d’identifier les produits non traditionnels à plus forte valeur ajoutée à travers une analyse de la demande internationale, d’élaborer des stratégies sectorielles de promotion des chaînes de valeur à haut potentiel d’exportation, etc.
La réalisation de ces actions permettra d’améliorer la contribution du secteur au PIB pour passer de 5,7 % en 2022 à 9,6 % à l’horizon 2027.
Qu’attendez-vous de la ZLECAf ?
Avec la signature en mars 2018 de l’accord instituant la ZLECAf puis sa ratification en avril 2019 par le 22e État, l’Afrique est en passe de devenir un marché unifié et intégré fort de 55 États membres de l’Union africaine, avec plus de 1,2 milliard de consommateurs et un PIB cumulé de plus de 2,5 milliards de dollars.
La ZLECAf représente une opportunité exceptionnelle pour le Burundi de renforcer aussi bien ses échanges intra-régionaux qu’intra-africains. Cela est très important compte tenu de l’atmosphère économique globale actuelle, qui s’avère de plus en plus instable.
La ZLECAf améliorera également les perspectives de diversification des exportations en haussant la demande d’exportation de produits manufacturés. De plus, il a pu être observé une augmentation de la part des produits manufacturés dans les exportations totales du Burundi vers le reste de l’Afrique.
Pour le commerce des services, le Burundi a déjà soumis sa liste d’engagements spécifiques dans les cinq secteurs prioritaires : services fournis aux entreprises, communication, services financiers, tourisme et transport.
En matière de normalisation et contrôle de la qualité, un centre régional de certification des produits, en appui à la ZLECAf, sera créé au Burundi grâce à l’appui technique et financier de la Commission des Nations unies pour l’Afrique.
Le transport reste une source majeure de pollution. Où en est aujourd’hui le Projet d’appui à la transition vers la mobilité électrique ?
Pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat et réduire la pollution croissante de l’air, les pays à faible et à moyen revenus, dont le Burundi, font partie actuellement d’un mouvement mondial vers la mobilité électrique. C’est dans ce cadre que le Gouvernement du Burundi, avec l’appui technique et financier du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), a initié le Projet d’appui à la transition vers la mobilité électrique au Burundi, sur financement du Fonds pour l’environnement mondial (FEM). Ce programme a été lancé officiellement le 4 avril 2024. Son objectif principal est de réduire les émissions de gaz à effet de serre du transport routier urbain ; il doit aussi faciliter le transit, la mobilité urbaine durable des passagers au Burundi, en mettant l’accent sur l’électrification du transport.
Il est à souligner que dans la phase de préparation du projet susvisé, une campagne de sensibilisation de toutes les parties prenantes sur les avantages de la mobilité électrique a été organisée à travers tout le pays.
Avec l’exercice budgétaire 2024-2025, le Gouvernement du Burundi a déjà pris quelques engagements, notamment la suppression de la taxe de consommation sur les véhicules électriques et hybrides. D’autres mesures incitatives pour l’importation des véhicules électriques ainsi que d’autres équipements connexes seront proposées au Gouvernement, notamment la diminution de la taxe de douane et de la TVA sur les véhicules électriques ou hybrides, et/ou les équipements de recharge de ces derniers.
Dans quelle mesure le tourisme est-il un levier de développement pour le pays, dans sa stratégie d’émergence ?
Le secteur touristique est l’un des leviers essentiels pour la transformation structurelle de l’économie. Ce secteur, une fois développé, contribue sensiblement à la création d’emplois directs et indirects, bref, à la dynamisation de la croissance économique, à l’amélioration des conditions de vie des populations par la redistribution de la richesse nationale et, partant, au renforcement de la cohésion sociale. Le développement harmonieux du secteur appelle donc une gestion responsable de l’important potentiel dont dispose le Burundi pour assurer une exploitation optimale des possibilités que le tourisme peut offrir aux populations.
Le tourisme peut également contribuer à l’entrée de devises dans le pays. Lorsque des visiteurs étrangers viennent, ils dépensent de l’argent dans les hôtels, les restaurants, les magasins et les attractions touristiques. Ces dépenses en devises étrangères peuvent donc aider non seulement à renforcer les réserves de devises du pays, mais aussi à stimuler l’économie locale.
Le tourisme peut jouer un rôle crucial dans la consolidation de la paix en favorisant les interactions positives entre les communautés locales et les visiteurs. En encourageant le tourisme local et domestique, les habitants peuvent mieux comprendre et apprécier leurs propres culture et patrimoine, ce qui renforce le sentiment d’identité et de fierté nationale. De plus, le tourisme de loisirs peut contribuer à atténuer les tensions en offrant des espaces de loisirs et de détente communs, où les gens peuvent se rencontrer, échanger et créer des liens, favorisant ainsi la cohésion sociale.
Le ministère est en train de soutenir le développement du secteur touristique, en le dotant d’un cadre légal pour que le travail se fasse dans la transparence et dans la légalité, en le dotant d’une politique nationale qui clarifie la vision du secteur, et en le dotant également de moyens financiers.
Quelle place le Burundi accorde-t-il aux Zones économiques spéciales (ZES) pour développer son industrie ? Comment le pays entend-il se démarquer sur le plan industriel ?
Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique nationale d’industrialisation, le Burundi s’est engagé dans un processus de création de ZES. La vision du Gouvernement est de mettre en place des espaces bénéficiant d’importantes incitations fiscales et douanières pour les investissements étrangers, permettant de promouvoir la valorisation de nos matières premières, de créer de l’emploi, de booster les exportations par l’insertion dans les chaînes de valeurs mondiales afin d’équilibrer notre balance commerciale. Nous voudrions faire du Burundi un hub industriel émergent tirant parti des avantages comparatifs dont dispose notre pays.
Le Burundi compte aussi capitaliser sur les importants potentiels agricole et minier pour augmenter le volume des exportations de produits manufacturés à plus forte valeur ajoutée. Des efforts sont faits pour développer les compétences de la main-d’œuvre, moderniser les chaînes de valeur prioritaires, améliorer la productivité et la qualité, et mettre en place un cadre légal et institutionnel attractif pour les investissements, notamment dans l’agro-industrie.




