L’éducation est un pilier fondamental pour le développement socioéconomique et politique d’un pays. Au Burundi, le Plan sectoriel de l’éducation (PSE) 2022-2030 vise à renforcer le système éducatif pour mieux répondre aux besoins de la population et aux exigences du marché du travail. Les initiatives clés et les perspectives de ce plan ambitieux mettent l’accent sur les efforts à fournir pour que le peuple soit uni et engagé dans le développement.
Par Rafik Ammar
État des lieux du secteur de l’éducation au Burundi
Le Burundi est l’un des pays les plus densément peuplés d’Afrique — plus de 430 habitants par kilomètre carré, avec une population en croissance rapide. En 2020, 61 % des Burundais avaient moins de 25 ans, ce qui crée une demande accrue de services éducatifs. Cependant, le système burundais fait face à plusieurs défis majeurs, dont une faible rétention des élèves, un taux élevé de redoublements et une mauvaise adéquation entre l’éducation et le marché du travail.
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L’accès à l’éducation reste limité, avec un taux brut de scolarisation de 12 % au préscolaire et de 28 % au post-fondamental en 2019. Par ailleurs, plusieurs insuffisances d’infrastructures scolaires ont été identifiées. Près de 60 % des écoles n’ont pas de dispositif adéquat pour le lavage des mains, ce qui pose des problèmes en matière d’hygiène et de prévention des maladies. En outre, de nombreuses écoles ne disposent pas de clôtures, d’où un manque de sécurité pour les élèves. Une autre difficulté récurrente est l’utilisation de bâtiments de fortune, notamment dans les zones rurales. Par exemple, dans certaines régions, des classes sont installées sous des abris temporaires en tôle ou en matériaux légers, ou dans des bâtiments non conçus à cet effet, tels que des églises ou des salles communautaires. Ces structures provisoires ne disposent souvent pas d’un équipement adéquat et sont vulnérables aux intempéries, ce qui rend l’environnement d’apprentissage précaire pour les élèves. De plus, le préscolaire, essentiel pour le développement des compétences de base, est particulièrement sous-développé et inégal.
Initiatives clés du PSE 2022-2030
Plusieurs initiatives sont proposées dans le PSE 2022-2030 pour surmonter ces défis. Parmi les priorités figurent l’amélioration de l’accès à l’éducation, la réduction des inégalités et l’augmentation du taux d’achèvement du cycle fondamental. Le plan prévoit également de renforcer la formation professionnelle pour mieux répondre aux besoins du marché du travail et promouvoir une économie plus inclusive et durable. Le développement de l’enseignement ainsi que de la formation technique et professionnelle est une priorité. Des efforts sont faits pour créer des centres de formation professionnelle dans chaque province et des écoles techniques dans les communes encore non pourvues. Ces institutions se concentreront sur des secteurs clés tels que l’agriculture, le génie civil ou les technologies, avec une attention particulière portée à la formation en alternance pour combler le fossé entre l’éducation et l’emploi.
En outre, le PSE met l’accent sur l’amélioration des infrastructures éducatives. Un programme de réhabilitation est en cours pour mettre aux normes les bâtiments scolaires existants et construire de nouvelles infrastructures résistantes aux intempéries et aux glissements de terrain. Cela inclut également des initiatives en faveur de l’hygiène et la santé scolaires, en réponse aux risques sanitaires tels que la malaria et l’anémie, souvent liés à la malnutrition.
Programmes de réalisation d’initiatives du PSE
Le PSE inclut des initiatives concrètes en termes éducatifs et d’amélioration des infrastructures. Par exemple, le programme « Twige Neza » prévoit un financement pour la construction et la réhabilitation de salles de classe, ainsi que pour l’achat de matériel pédagogique. Ce programme est essentiel pour assurer la continuité des apprentissages dans les situations d’urgence, avec une allocation de 52 milliards de francs burundais (environ 18 millions de dollars) pour la période 2022-2025. De plus, l’initiative « Resilience to Covid-19 through Digitalisation » (ResiCoDI), soutenue par l’Agence belge de développement et l’Union européenne, vise à digitaliser l’enseignement professionnel et technique pour renforcer la résilience face aux crises. Son budget est de 1,2 milliard de francs burundais (environ 416 500 dollars). Ces efforts démontrent l’engagement du Gouvernement et de ses partenaires pour améliorer la qualité de l’éducation et les conditions d’apprentissage, en particulier dans les régions les plus vulnérables.
Vers une éducation de qualité et inclusive
Le PSE vise à créer un système éducatif plus inclusif et équitable. Afin d’atteindre cet objectif, des efforts sont déployés pour former les enseignants, densifier les curricula et renforcer l’apprentissage des langues, notamment le français, crucial pour la transition vers les niveaux supérieurs d’éducation. Des émissions de radio et des guides pour les enseignants sont également prévus pour soutenir l’enseignement en langue française.
La promotion de l’éducation des filles est un autre volet essentiel du PSE. Des mesures telles que la cellule « zéro grossesse » visent à réduire les grossesses précoces non désirées, qui sont une cause majeure d’abandon scolaire chez les adolescentes. La scolarité est aussi perçue comme un facteur de protection contre ces grossesses, ce qui contribue à l’amélioration des conditions de vie des jeunes filles. Pour encourager la scolarisation des filles, des campagnes de mobilisation sociale et de sensibilisation sont mises en place. Ces actions incluent la lutte contre les violences sur le chemin de l’école et l’accompagnement des élèves victimes de violences basées sur le genre, afin de garantir leur retour à l’école et leur poursuite d’études dans un environnement sûr.
En ce qui concerne les infrastructures scolaires, le PSE prévoit la construction de latrines séparées pour les filles et les garçons, afin de promouvoir un environnement scolaire sain et sécurisé. Des rampes d’accès sont également installées pour les enfants en situation de handicap, et un Centre de référence pour l’éducation inclusive (CREI) est en cours de finalisation, visant à soutenir l’intégration des élèves ayant des besoins spéciaux.
De plus, le ministère de l’Éducation nationale et de la Recherche scientifique développe des programmes de nutrition scolaire dans les zones de grande pauvreté. Ces programmes, avec une augmentation prévue des fonds alloués de 67 % sur dix ans, visent à améliorer la santé des élèves, leur concentration et leur assiduité, contribuant ainsi à un meilleur rendement scolaire.
Toutes ces initiatives montrent l’engagement du Burundi à optimiser l’accès et la qualité de l’éducation, réduire les inégalités et offrir un soutien particulier aux groupes vulnérables, avec une attention particulière pour les filles et les enfants handicapés.
Perspectives et défis à venir
Malgré les avancées prévues, le pays doit encore relever plusieurs défis pour garantir le succès de son système éducatif. La mobilisation des ressources financières est cruciale pour la mise en œuvre des initiatives du PSE. Le partenariat public-privé est encouragé afin de diversifier les sources de financement et soutenir le développement des infrastructures et des programmes éducatifs.Enfin, lePSE 2022-2030 présente une feuille de route ambitieuse pour transformer le système éducatif et former un peuple uni et engagé dans le développement. Il s’agit d’un effort collectif nécessitant la coopération de tous les acteurs, du Gouvernement aux communautés locales, pour garantir une éducation de qualité pour tous.