Les Dominicains sont un peuple vivant et vibrant d’un multiculturalisme foisonnant. Cette joie de vivre et de communiquer se ressent dans la création, qu’elle soit musicale, littéraire ou audiovisuelle. Des personnalités contribuent au rayonnement culturel du pays sur la scène internationale. En voici quelques-unes.
Par Stanislas Gaissudens
Le rythme dans la peau !
S’il est un domaine dans lequel les Dominicains excellent, c’est sans aucun doute celui de la musique, qui fait partie intégrante de la vie des habitants. Du matin jusqu’au soir… et même au-delà, le son rythme la vie des insulaires, qu’ils soient dans la capitale ou dans un village reculé de montagne. On ne compte plus le nombre de chanteurs et de musiciens célèbres qui ont fait et continuent de faire briller le nom du pays dans le monde entier.
Sur le plan musical, on pense immédiatement à Juan Luis Guerra, incontestablement l’une des icônes populaires de la République dominicaine. S’il commence à jouer de la guitare dès ses 10 ans, ce n’est qu’au début des années 1980 que son rêve musical se concrétise. Il enregistre de manière indépendante ce qui deviendra l’album Soplando, initialement rejeté par la maison de disques Karen, et finalement accepté un an plus tard sous le titre Mudanza y acarreo. L’album Mientras más lo pienso… tú sorti en 1986 le propulse sur le devant de la scène et lui confère le statut de star. Il perce en Espagne, puis dans le monde entier. C’est l’un des artistes latins les plus internationalement reconnus de ces dernières décennies. Son style populaire de merengue et de fusion afro-latine lui a valu un succès considérable dans toute l’Amérique latine. Il est également reconnu pour avoir popularisé la bachata au niveau mondial. À 67 ans, le chanteur, qui a exploré et renouvelé tous les styles musicaux de son île natale, continue de se produire sur tous les continents.
Juan Luis Guerra a influencé toute une génération de jeunes musiciens, qui ont su s’approprier les rythmes traditionnels et les remettre au goût du jour. La jeune Yendry, récompensée aux Latin American Music Awards en 2021, en fait partie. Elle a réussi à mixer bachata, merengue, salsa, R&B et électro, et assure que Juan Luis Guerra fait partie des personnes qui l’ont le plus influencée, avec Yoskar « El Prabu » Sarante. Décédé en 2019, ce dernier, chanteur de bachata, était une star incontestée. Il est impossible de ne pas évoquer également Johnny Ventura, mort en 2021, qui était une figure de la musique caribéenne et latina, avec des tubes comme « La Muerte de Martin », « Dilema » ou encore « Cabo E’ Vela ». Au cours de sa carrière, il a produit plus de 100 albums. Surnommé « El Caballo mayor » (« le Grand Cheval »), Johnny Ventura avait aussi été député-maire de Saint-Domingue. Autre grand nom de la nouvelle génération, Anthony « Romeo » Santos est l’un de ses héritiers. Né aux États-Unis d’une mère portoricaine et d’un père dominicain, il a été le leader du groupe de bachata Aventura, avant d’effectuer une carrière solo internationale. Il a collaboré avec les plus grands noms de la bachata et des artistes pop tels que Drake, Nicki Minaj ou Carlos Santana.
Il serait impossible de nommer tous les artistes dominicains de la scène traditionnelle ou actuelle, tant le pays foisonne de talents, mais nous pourrions citer aussi, parmi d’autres, le rappeur El Alfa, connu sous le nom de King of Dembow, les chanteurs de merengue Milly Quezada et Joseito Mateo, ou encore Fernando Villalona, surnommé « El Mayimbe ».
Lettres et audiovisuel
Marcio Veloz Maggiolo, né en 1936 à Saint-Domingue, où il est décédé en 2021, est considéré comme le plus grand auteur dominicain contemporain. Romancier, essayiste, dramaturge et journaliste, il a été le lauréat de nombreux prix littéraires, dont le Prix national des lettres, pour l’ensemble de son œuvre. Il fut par ailleurs archéologue, ethnologue et professeur à l’université de Saint-Domingue. Le bâtiment hébergeant le ministère de la Culture porte aujourd’hui son nom.
Avant lui, la République dominicaine a connu de grands talents littéraires, tels que Pedro Henríquez Ureña, né en 1884. Cet intellectuel, philologue, critique littéraire, humaniste, essayiste et poète était le fils du médecin et homme politique Francisco Henríquez y Carvajal et de Salomé Ureña, grande poétesse et éducatrice dominicaine. Il a vécu à Cuba, au Mexique et à Paris, avant de s’installer durablement à Buenos Aires, où il est décédé en 1946.
À l’heure des écrans, la culture caribéenne et latina a le vent en poupe, et de plus en plus d’acteurs de renom, présents dans des blockbusters américains, sont d’origine sud-américaine ou caribéenne. Ainsi l’actrice Zoe Saldaña, qui a grandi dans le Queens à New York avant d’aller vivre en République dominicaine avec sa mère, après le décès de son père alors qu’elle n’avait que 9 ans. Michelle Rodríguez, révélée par la série de films Fast and Furious, est, elle aussi, née aux États-Unis, au Texas, de mère dominicaine. À l’image de ces deux stars, de nombreux acteurs contribuent à essaimer la culture caribéenne dans le monde.
Óscar de la Renta
L’homme qui sublimait les femmes
© AFP – DOUG KANTER
Né en 1932 à Saint-Domingue, le créateur de mode Óscar de la Renta est sans doute l’une des personnalités dominicaines ayant rencontré le plus de succès à l’international. Il quitte son île natale à l’âge de 18 ans pour étudier la peinture à l’Académie de San Fernando à Madrid, mais très vite se tourne vers le monde de la mode. En 1961, il s’installe à Paris, où il travaille comme styliste et devient assistant d’Antonio Castillo chez Lanvin, avant de déménager à New York deux ans plus tard pour dessiner les collections de haute couture et de prêt-à-porter d’Elizabeth Arden. C’est aux États-Unis qu’il perce vraiment. En 1965, il fonde à New York sa propre maison, à laquelle il donne son nom. La griffe De la Renta devient rapidement synonyme de tenues à la fois luxueuses et décontractées pour femmes du monde, dont beaucoup sont des amies de son épouse, Françoise de Langlade, rédactrice en chef de l’édition française de Vogue. Il prend la nationalité américaine en 1969.
En 1977, son premier parfum, Oscar, est un succès. En 1982, il contribue à la création de l’orphelinat La Casa del Niño en République dominicaine. Après le décès de sa première femme, il épouse Anne France Mannheimer (appelée aussi Annette Reed) en 1989. De 1993 à 2002, il est directeur artistique de la maison de haute couture Balmain.
Óscar de la Renta a habillé la plupart des First Ladies américaines, de Jacqueline Kennedy à Michelle Obama, en passant par Nancy Reagan et Hillary Clinton. Les actrices Amy Adams, Sarah Jessica Parker et Penélope Cruz comptèrent également parmi ses clientes fidèles. « Mon rôle, en tant que créateur, est de faire tout mon possible pour qu’une femme apparaisse sous son meilleur jour. La mode n’est mode que quand une femme la porte », disait-il.
Le styliste a reçu le prix « Lifetime Achievement Award » du Council of Fashion Designers of America (CFDA) en 1990, puis en 2000 et 2007, ainsi que le prix CFDA « Womenswear Designer of the Year Award ». En 2006, Parsons lui a décerné le « Lifetime Achievement Award » lors de son 58e défilé annuel de mode et de charité. Le créateur est décédé en 2014.