Le Sommet Corée-Afrique 2024, tenu en juin à Séoul, a marqué un tournant significatif dans les relations entre la Corée du Sud et le continent africain. Cet évènement, qui a réuni des chefs d’État et des représentants de plus de 50 pays africains, ainsi que des organisations internationales, a mis en lumière les nouvelles dynamiques de coopération et les engagements mutuels pour un développement durable et inclusif.
Par Rafik Ammar
Les nouveautés clés du Sommet
Lors de ce sommet, plusieurs annonces et initiatives inédites ont été présentées, marquant une intensification des relations bilatérales et une diversification des domaines de coopération.
Tout d’abord, la Corée du Sud a lancé un ambitieux programme de coopération énergétique visant à soutenir la transition vers des énergies renouvelables en Afrique. Ce programme, doté d’un fonds de 1 milliard de dollars, est destiné à financer des projets solaires, éoliens et hydroélectriques dans les pays africains partenaires. Ce fonds est une réponse directe aux besoins croissants en énergie propre du continent et représente une avancée majeure dans l’effort global de lutte contre le changement climatique.
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Par ailleurs, une série d’accords ont aussi été signés pour le développement de hubs technologiques dans plusieurs capitales africaines, comme à Nairobi au Kenya, Lagos au Nigéria ou encore Accra au Ghana, avec un accent particulier mis sur les technologies de l’information et de la communication. Ces hubs, soutenus par des géants sud-coréens comme Samsung et LG, seront des centres d’innovation destinés à promouvoir l’entrepreneuriat local et à renforcer les compétences numériques. Ils offriront également des formations spécialisées et des opportunités de développement pour les jeunes Africains.
Toutefois, la pandémie de Covid-19 a mis en évidence l’importance de la coopération internationale en matière de santé. En réponse à cette attente, la Corée du Sud a proposé un plan d’action pour renforcer les systèmes de santé africains, incluant la construction de centres de recherche biomédicale et la fourniture de technologies médicales avancées, à Addis Abeba en Éthiopie ou encore en Ouganda, là où existe une forte tradition de recherche médicale et d’innovations en santé publique. Kampala accueillera ainsi un centre spécialisé dans les études sur le VIH-sida et d’autres maladies transmissibles. Ce plan global comprend également des partenariats pour la production locale de vaccins et de médicaments, ce qui réduira la dépendance des pays africains aux importations.
Enfin, un autre point fort du Sommet a été l’engagement commun pour la préservation de la biodiversité et la gestion durable des ressources naturelles. La Corée du Sud a proposé de partager son expertise en matière de gestion des ressources hydriques et de lutte contre la désertification, des défis critiques pour de nombreuses régions africaines.
Des projets de reforestation et de conservation de la faune ont également été finalisés, avec des engagements financiers à l’appui. On trouve notamment l’initiative « Verdissement du Sahel », projet ambitieux qui vise à planter 10 millions d’arbres sur une période de cinq ans dans les pays du Sahel, tels que le Niger, le Mali et le Tchad. L’objectif est de restaurer les terres dégradées, de prévenir l’avancée du désert et de soutenir les communautés locales en créant des emplois verts.
Il y a également le programme de restauration des forêts tropicales du bassin du Congo. En partenariat avec plusieurs pays d’Afrique centrale, dont la RDC, le Gabon et le Cameroun, ce projet cible la restauration de vastes étendues. Il inclut la replantation d’espèces indigènes, la lutte contre l’exploitation illégale du bois et la promotion de la gestion durable des ressources forestières.
Un projet de reboisement des montagnes de l’Atlas au Maroc a été annoncé. Il se veut une réponse aux effets de l’érosion et des changements climatiques. En partenariat avec des ONG locales et le Gouvernement marocain, le projet prévoit la plantation d’arbres résistant à la sécheresse et l’amélioration des pratiques agricoles pour réduire la pression sur les écosystèmes forestiers.
La « Green Belt Initiative », au Kenya et en Ouganda, figure aussi dans les engagements des deux parties. Inspirée des travaux de la lauréate du prix Nobel de la paix Wangari Maathai, cette initiative vise à étendre les ceintures vertes existantes dans ces deux pays, avec un accent particulier mis sur la conservation des forêts montagnardes et des zones riveraines. Le projet comprend également des programmes d’éducation environnementale pour sensibiliser les communautés locales à l’importance de la préservation des forêts.
En outre, un projet de restauration des mangroves en Afrique de l’Ouest, qui vise des pays comme la Guinée-Bissau, la Gambie et la Sierra Leone, a vu le jour. Les mangroves jouent un rôle crucial dans la protection des côtes, la préservation de la biodiversité et la capture du carbone. Le projet inclut la replantation de mangroves, la protection des zones humides et le soutien aux communautés locales pour le développement durable.
Historique des relations Corée-Afrique et précédents sommets
Les relations entre la Corée du Sud et les pays africains ont commencé à se renforcer dans les années 1980, avec une augmentation des échanges commerciaux et des collaborations culturelles. Le premier Sommet Corée-Afrique a eu lieu en 2006, marquant le début d’une série de rencontres régulières visant à approfondir les liens économiques et politiques. Depuis lors, chaque sommet a vu une participation croissante des pays africains et une diversification des sujets abordés, passant de l’assistance au développement à des partenariats plus équilibrés dans des domaines tels que les technologies, l’éducation ou la sécurité.
Les sommets notables :
– Sommet de 2012 : Focalisé sur la sécurité alimentaire, ce sommet a abouti à des accords pour l’amélioration des infrastructures agricoles et la modernisation des systèmes d’irrigation.
– Sommet de 2016 : Cette rencontre a marqué un tournant, avec l’accent mis sur l’industrialisation de l’Afrique. Des accords de coopération ont été signés pour soutenir le développement des PME et des industries manufacturières.
– Sommet de 2018 : L’Initiative de coopération Corée-Afrique pour la paix et la sécurité a été lancée, avec des programmes spécifiques pour la formation des forces de sécurité et le renforcement des capacités de gestion des conflits.
Vers une coopération renforcée
Le Sommet Corée-Afrique 2024 a consolidé le rôle de la Corée du Sud comme partenaire clé pour le développement de l’Afrique, tout en consolidant sa position sur la scène internationale. La diversité des projets et des initiatives présentés témoigne d’une volonté mutuelle de s’engager dans une coopération à long terme, basée sur des principes de respect et de bénéfice mutuel. Avec des engagements dans des secteurs prioritaires tels que l’énergie, la santé, les technologies et l’environnement, la Corée du Sud et les pays africains ouvrent un nouveau chapitre de leur relation, qui promet de contribuer significativement à la croissance et au développement durable du continent africain.
Ce sommet a non seulement renforcé les liens existants mais également ouvert de nouvelles voies pour une collaboration future, faisant de cette rencontre un moment historique pour les relations Corée-Afrique.